Encore un cas d'annulation de marque, cette fois pour atteinte à un nom commercial

Dans le prolongement de la précédente brève qui concernait un cas d'annulation de marque pour fraude, signalons cette décision de la Cour d'appel de Paris du 18 octobre 2016 dans une affaire légèrement différente, mais qui permet à nouveau d'illustrer les règles relatives à l'annulation d'une marque déposée.

Cette affaire opposait deux sociétés qui exerçaient leurs activités sous la dénomination "SOLUTION EVENEMENTS" pour l'une et "SOLUTIONS EVENEMENTS" pour l'autre. La société B avait déposé la marque "SOLUTIONS EVENEMENTS" en 2008 et la société A avait sollicité l'annulation de cette marque pour atteinte à son nom commercial, qu'elle exploitait depuis 2004.

En première instance, comme en appel, les juges ont donné gain de cause à la société A demanderesse, sur le fondement de l'article L. 711-4 du Code de la propriété intellectuelle. Selon ce texte, est interdit le dépôt d'une marque qui porte atteinte à un nom commercial antérieur, à condition de rapporter la preuve d'un risque de confusion dans l'esprit du public. Dans les deux cas ici, les sociétés exerçaient leurs activités dans le domaine de l'événementiel. Compte tenu de la proximité des deux signes (qui ne se distinguaient que par la seule présence d'un "S"), le risque de confusion était difficilement contestable. La marque a donc été annulée.

L'intérêt de cet arrêt réside dans la réponse à un argument tiré de la prétendue "bonne foi" du déposant de la marque. La société B soutenait en effet qu'elle n'avait pas connaissance du nom commercial antérieur lorsqu'elle a procédé au dépôt, de sorte qu'elle aurait dû bénéficier d'une forme d'exonération. Mais ce n'est pas ce que dit la loi. 

En effet, l'article L. 714-3 du Code de la propriété intellectuelle, qui régit les cas d'annulation de marque, expose que la sanction ne peut être évitée que si et seulement si la marque a été déposée de bonne foi et son usage a été toléré pendant cinq ans. Ce n'était pas le cas en l'espèce, la condition temporelle étant manquante.

Pour le surplus, on relèvera que la société A n'a pas obtenu gain de cause sur sa demande de condamnation au titre d'actes de concurrence déloyale, dès lors qu'elle n'est pas parvenue à démontrer que la société B avait choisi un nom commercial quasi-identique au sien dans le but de créer un risque de confusion ou de se placer dans le sillage de la société en demande. L'arrêt relève à rebours que le nom en question n'est pas distinctif, ce qui rejoint une jurisprudence déjà bien établie sur l'absence de protection des noms commerciaux trop banals. Et les juges de considérer que le fait de ne pas procéder à une recherche d'antériorité avant un dépôt de marque n'était pas fautif en soi.

On recommandera toutefois chaudement à tous les déposants de marque de procéder à une telle recherche auprès de leur avocat préféré, ne serait-ce que pour limiter le risque d'annulation de la marque par le juge plusieurs années après le dépôt.